Le mot du curé

patrick
Pourquoi le carême ?

Lorsqu'un homme part en voyage, il doit savoir où il va. Ainsi en est-il du Carême. Avant tout, le carême est un voyage spirituel et sa destination est Pâques, la « Fête des fêtes ». Pâques est beaucoup plus qu'une Fête parmi les fêtes, beaucoup plus qu'une commémoration annuelle d'un événement passé ? En quel sens célébrons-nous, comme nous prétendons le faire " la mise à mort de la mort, la destruction de l'enfer, le début d'une vie nouvelle et éternelle" dans la nuit de Pâques? À cette question la réponse est celle-ci : la vie nouvelle qui, voici près de deux mille ans, a jailli du tombeau, nous a été donnée, à nous tous qui croyons au Christ. Et elle nous a été donnée au jour de notre baptême où, comme le dit saint Paul, « nous avons été ensevelis avec le... Lire plus
Pourquoi le carême ?

Lorsqu'un homme part en voyage, il doit savoir où il va. Ainsi en est-il du Carême. Avant tout, le carême est un voyage spirituel et sa destination est Pâques, la « Fête des fêtes ». Pâques est beaucoup plus qu'une Fête parmi les fêtes, beaucoup plus qu'une commémoration annuelle d'un événement passé ? En quel sens célébrons-nous, comme nous prétendons le faire " la mise à mort de la mort, la destruction de l'enfer, le début d'une vie nouvelle et éternelle" dans la nuit de Pâques? À cette question la réponse est celle-ci : la vie nouvelle qui, voici près de deux mille ans, a jailli du tombeau, nous a été donnée, à nous tous qui croyons au Christ. Et elle nous a été donnée au jour de notre baptême où, comme le dit saint Paul, « nous avons été ensevelis avec le Christ dans sa mort, afin que, comme le Christ est ressuscité des morts, nous vivions nous aussi, dans une vie nouvelle » (Rm 6, 4).

Ainsi nous célébrons à Pâques la Résurrection du Christ comme quelque chose qui est arrivé et qui nous arrive encore. Car chacun d'entre nous a reçu le don de cette vie nouvelle et la faculté de l'accueillir et d'en vivre. C'est un don qui change radicalement notre attitude envers toutes choses en ce monde, y compris la mort, et qui nous donne de pouvoir affirmer joyeusement : "La mort n'est plus!". Certes, la mort est encore là, et nous l'affrontons toujours et un jour elle viendra nous prendre. Mais là réside toute notre foi : par sa propre mort, le Christ a changé la nature même de la mort, il en a fait un passage, dans le Royaume de Dieu. C'est pourquoi, à la fin des Matines de Pâques, nous disons : "Le Christ est ressuscité, et voilà la Vie qui gouverne !" Le Christ est ressuscité, et aucun mort ne reste au tombeau. Telle est la foi de l'Église. Et cependant n'expérimentons­-nous pas journellement que cette foi est bien rarement la nôtre, que toujours nous perdons et trahissons la vie nouvelle que nous avons reçue en don et que, en fait, nous vivons comme si le Christ n'était pas ressuscité des morts, comme si cet événement unique n'avait pas la moindre signification pour nous ? Tout ceci en raison de notre faiblesse, à cause de l'impossibilité où nous sommes de vivre constamment de foi, d'espérance et de charité, au niveau auquel le Christ nous a élevés lorsqu'il a dit: " Cherchez avant tout le Royaume de Dieu et sa justice". Nous l'oublions, tout simplement, tant nous sommes occupés, immergés dans nos occupations journalières. Et par cet oubli, notre vie redevient "vieille" de nouveau, c.-à-d. sans référer notre vie à cette vie nouvelle que le Christ nous a révélée et nous a donnée. En fait, nous vivons comme s'il n'était jamais venu.

Si nous en prenons conscience, alors nous pouvons comprendre ce que recouvre la réalité de Pâques et pourquoi elle nécessite et présuppose le Carême. Le carême est fait avant tout pour nous aider à recouvrer la vision et le goût de cette vie nouvelle, que nous trahissons si facilement, et ainsi nous pourrons nous repentir et revenir à cette vie. Et on doit le dire : la "vieille" vie, n'est pas facilement vaincue et transformée. L'Évangile attend et demande de l'homme un effort dont il est, dans son état actuel, virtuellement incapable. Nous sommes mis en face d'un but, d'un mode de vie qui est tellement au-dessus de nos possibilités ! Les apôtres eux-mêmes, lorsqu'ils entendirent l'enseignement de leur maître, lui demandèrent, désespérés : « Comment cela est-il possible ? ». Or le Christ dit dans l'Évangile : "Choisissez la voie étroite, combattez et souffrez, car c'est le chemin de l'unique vrai bonheur". Sans le secours de l'Eglise, comment pouvons-nous faire ce choix terrible, comment pouvons-nous nous repentir et revenir à la glorieuse promesse qui nous est donnée chaque année à Pâques ? C'est ici qu'intervient le Carême. C'est le secours que nous offre l'Église, l'école de repentance qui, seule, nous rendra possible d'accueillir Pâques comme la fin de ce qui est "vieux" en nous, comme notre entrée dans le "nouveau ".

Dans l'Église primitive, le principal but du Carême était de préparer au baptême les catéchumènes, c'est-à-dire les chrétiens nouvellement convertis, en un temps où le baptême était administré au cours de la liturgie pascale. Cependant, même lorsque l'Église ne baptisa plus des adultes et que l'institution du catéchuménat eut disparu, le sens fondamental du Carême demeura le même. Car, bien que nous soyons baptisés, ce que nous perdons et trahissons constamment, c'est précisément ce que nous avons reçu au baptême. C'est pourquoi Pâques est notre retour annuel à notre baptême, tandis que le Carême est notre préparation à ce retour, l'effort lent et soutenu pour, finalement, accomplir notre propre "passage " ou " pâque" dans la nouvelle vie en Christ. Vraiment, chaque année, le Carême et Pâques nous font redécouvrir une fois de plus et recouvrer ce que le passage baptismal à travers la mort et la résurrection avait opéré en nous.